L’eau en suspension
Nous savons maintenant que les poils du coquelicot servent à héberger la rosée du matin.
Nous savons maintenant que les poils du coquelicot servent à héberger la rosée du matin.
Le bruit de la planète avant les humains. Et même le bruit de la planète avant la vie : le vent, les vagues, la pluie, l’orage.
Parfois un volcan ou un tremblement de terre. La glace qui craque au dégel.
Le son avant le son.
Quand le soir approchait je descendais des cimes de l’île et j’allais volontiers m’asseoir au bord du lac sur la grève dans quelque asile caché ; là le bruit des vagues et l’agitation de l’eau fixant mes sens et chassant de mon âme toute autre agitation la plongeaient dans une rêverie délicieuse où la nuit me surprenait souvent sans que je m’en fusse aperçu. Le flux et reflux de cette eau, son bruit continu mais renflé par intervalles frappant sans relâche mon oreille et mes yeux, suppléaient aux mouvements internes que la rêverie éteignait en moi et suffisaient pour me faire sentir avec plaisir mon existence sans prendre la peine de penser.
Jean-Jacques Rousseau, Les rêveries du promeneur solitaire